Michael Curtiz, de son vrai nom « Mihaly Kertesz » est né à Budapest en 1888. Au sein d’une famille aisée de la bourgeoisie hongroise il s’intéresse dès son adolescence au théâtre et devient très jeune un acteur et un metteur en scène réputé. S’initiant au cinéma sous la tutelle des cinéastes Mauritz Stiller et Victor Sjöström, Michael Curtiz tourne son premier film « Aujourd’hui et demain » en 1912. Devenant durant la grande guerre reporter d’actualités, il réalise pourtant une cinquantaine d’œuvres dont on conserve peu de traces aujourd’hui. Outre son succès en 1914 avec « Bank Ban » on notera aussi l’une des premières adaptations au cinéma de la « La veuve joyeuse » en 1918. L’année suivante, alors en plein tournage de « Liliom », le réalisateur est contraint de fuir son pays rongé par la guerre civile, lorsque les studios hongrois sont nationalisés par le chef révolutionnaire communiste Bela Kun. Trouvant refuge en Autriche, Michael Curtiz va voir sa carrière prendre un nouvel essor lorsque lui est confié la réalisation de plusieurs épopées bibliques, destinées à concurrencer en Europe les films américains de C. B. DeMille sur le même sujet. Il réalise ainsi des versions maintes fois portées à l’écran depuis comme « Sodome et Gomorrhe » ou « Samsom et Dalila ». Que ce soit en Autriche ou lors de son court séjour à Berlin en 1925, Curtiz va faire débuter de futures vedettes d’Hollywood en la personne de Bela Lugosi, Lili Damita (bientôt femme d’Errol Flynn), ou faire une vedette de l’oubliée Lucy Dorraine, (épouse du réalisateur), qu’il fera jouer en 1923, juste avant de rompre dans « Les chemins de la terreur » sombre mélodrame au accents de serial. En 1926, Jack Warner le producteur américain assiste lors d’un séjour à Paris au visionnage de « L’esclave reine » dernière mouture pharaonesque de Curtiz. Emballé par la qualité du film, Jack Warner parvient à convaincre le cinéaste de partir pour Hollywood et de signer pour la Warner Bros. Choisissant à cette occasion d’américaniser son nom, Curtiz ne sait pas encore que c’est une fidèle union de vingt-sept ans qui débute. Commençant à travailler dès son arrivée, Curtiz signe son péplum en 1928 avec « L’arche de Noé » puis tourne des œuvres dans des genres très différents allant du fantastique avec Boris Karloff dans « Le mort qui Marche » au mélodrame social avec l’émouvant « The strange love of Molly Louvain ». En 1936, la renommée de Michael Curtiz grandit encore lorsque la Warner décide de lui associer le couple vedette « Errol Flynn – Olivia De Havilland ». De cette union fertile, sept films entre 1935 et 1940, plusieurs merveilles vont ainsi voir le jour. Il suffit pour s’en convaincre de revoir « La charge de la brigade légère », « Capitaine Blood », « La vie privée d’Elizabeth et d’Essex » ou « Les aventures de Robin des Bois » . Dans ce film, Curtiz qui utilise pour la seconde fois la couleur après le méconnu « La bataille de l’or » (si l’on excepte le procédé utilisé pour « Masques de cire » en 1933) réalise une œuvre aussi joyeuse qu’indémodable qui fera beaucoup pour le prestige d’Errol Flynn. (On ne pourra en dire autant , malgré ses indéniables qualités de « La Piste de Santa Fe » véhiculant un parti pris sudiste et un affront si flagrant à l’histoire que cela en devient gênant.) Cependant l’entente entre Curtiz et l’acteur se voit brisée, lorsque Errol Flynn ne supportant plus le caractère grossier et arrogant du réalisateur (ce qu’il était effectivement) décide de ne plus être dirigé que par le seul Raoul Walsh. (N’oublions pas aussi de nommer, avant la brouille qui allait définitivement les séparer, leurs westerns en communs « Les conquérants » et « La caravane héroïque » ainsi que le sublime film de pirates « Capitaine Blood »). Même sans son poulain, Michael Curtiz est égal à lui-même lorsqu’il signe « Le vaisseau fantôme » en 1941. Ce superbe drame maritime ou règne un Edward G Robinson resplendissant est le prélude à ce qui est considéré comme la pièce maîtresse(à l’égal d’ «Autant en emporte le vent ») de la filmographie de Michael Curtiz : « Casablanca ». Ce film, empreint d’une propagande salutaire et qui fut tourné avec un scénario accouché au jour le jour, fit découvrir à l’Amérique nouvellement en guerre une œuvre forte, propre à lui insuffler un courage devenu nécessaire. Humphrey Bogart, cynique à souhait, interprétant parfaitement un homme sommé de choisir entre son bien être et sa conscience, symbolisant idéalement ce qu’éprouvaient les américains à cette époque Salué tant par la critique que par le public, « Casablanca » remporte lors de sa sortie en 1942 les oscars du meilleur film, réalisateur et scénario. En état de grâce et s’inscrivant dans l’effort de lutte de la Warner, Michael Curtiz va ensuite tourner plusieurs films de guerre dont le romanesque « Passage to Marseille » ou le réalisateur retrouvait Humphrey Bogart et trois autres acteurs de « Casablanca Avec « Le roman de Mildred Pierce » en 1945, le cinéaste aborde le film noir par un coup de maître qui vaudra à Joan Crawford de remporter l’oscar de la meilleure actrice pour son rôle de femme d’affaires devant faire face à la noirceur de sa propre fille. On peut considérer que c’est à cette époque que commence le déclin de Michael Curtiz, car même si quelques réussites viennent encore jalonner sa carrière, (On peut ainsi citer « Trafic en haute mer » ou « Le roi du tabac » avec Gary Cooper), le style du cinéaste s’essouffle et l’on ne retrouve plus sa griffe incisive qui fit sa renommée. En 1953, Michael Curtiz achève sa longue collaboration avec la Warner Bros par un western « L’homme des plaines ». En 1954, son talent fait encore éclat dans le mésestimé péplum « L’égyptien », mais c’est le chant du cygne, et ce réalisateur qui fut l’un des maîtres d’Hollywood va finir sa carrière avec des films non dénués de qualités mais qui n’atteindront jamais la grandeur de leurs devanciers. Après une sympathique mise en scène des aventures de Huckleberry Finn, Michael Curtiz signe, son ultime opus en 1961 avec un western de bonne facture « Les Commancheros » Mettant en scène John Wayne, un autre vétéran d’Hollywood, celui qui fut considéré comme l’incarnation même de la Warner Bros ne survivra pas plus de deux ans à son dernier coup de manivelle. Il décède à Los Angeles le 11 avril 1962. |
Michael Curtiz, réalisateur assez inégal, tout au long de sa très longue carrière, qui fut abondante en films de genre, était capable du bon comme du moins bon voire du pire. |